HOMOLOGATION D'UN MANDAT DE PROTECTION / OUVERTURE D'UNE TUTELLE

27 Mars 2024
Par Me Joëlle Tremblay, notaire

La protection des personnes vulnérables occupe une place très importante dans notre société, davantage lorsqu’une personne est en perte d’autonomie et qu’elle doit être déclarée inapte légalement. C’est la raison pour laquelle il existe des mécanismes de protection prévus par la loi et ces mécanismes sont principalement l’homologation du mandat de protection (en présence d’un mandat de protection) et l’ouverture d’une tutelle (en l'absence d’un mandat de protection).

Il est important de faire un léger survol de ce qu’est un mandat de protection. L’article 2166 du Code civil du Québec prévoit ce qui suit :

« Le mandat de protection est celui donné par une personne majeure en prévision de son inaptitude à prendre soin d’elle-même ou à administrer ses biens; il est fait par acte notarié en minute ou devant témoins. Il ne peut être fait conjointement par deux ou plusieurs personnes. »

Plusieurs différences existent entre les deux mécanismes de protection reconnus au Québec, créant d’importantes distinctions quant aux impacts sur l’administration des biens de la personne vulnérable et le consentement à ses soins. Regardons ensemble les principales différences à l’aide du tableau explicatif ci-bas

Homologation d’un mandat de protection

Ouverture d’une tutelle

Représentant légal

Mandataire

Tuteur

Lorsque vous préparez votre mandat de protection, vous nommez des personnes afin qu’elles administrent en votre nom vos biens et consentent en votre nom à vos soins dans le cas où vous deviendrez inapte.

Lorsqu’une personne devient inapte et qu’elle n’a pas signé de mandat de protection, il est nécessaire de lui nommer un tuteur.

 

Le tuteur est proposé dans le cadre de la procédure d’ouverture de tutelle, plus précisément lors de l’assemblée de parents, d’alliés ou d’amis. Par la suite, le tribunal confirme ou non cette nomination lorsqu’il rend son jugement pour l’ouverture de tutelle.

Vous pouvez nommer une seule personne pour agir comme mandataire ou plusieurs personnes en même temps.

Attention : il est possible de nommer deux tuteurs à la personne seulement lorsque les tuteurs sont les père et mère (article 268.1 alinéa 1 du Code civil du Québec).

Vous pouvez nommer une même personne pour agir comme mandataire aux biens (administration des biens) et mandataire à la personne (consentement aux soins) ou des personnes différentes.

Il est possible que soient nommées une même personne pour agir comme tuteur aux biens (administration des biens) et tuteur à la personne (consentement aux soins) ou des personnes différentes.

Il est fortement recommandé de nommer des mandataires remplaçants dans le cas où le mandataire nommé ne peut pas agir (ex. : en cas de décès, de renonciation, d’inaptitude).

Depuis l’entrée en vigueur de la Loi visant à mieux protéger les personnes en situation de vulnérabilité en novembre 2022, il est maintenant possible de nommer un tuteur remplaçant dans le cas où le tuteur nommé ne peut pas agir (ex. : en cas de décès, de renonciation, d’inaptitude).

Fait intéressant : il n’est pas possible de nommer le Curateur public du Québec pour agir comme mandataire.

Fait intéressant : il est possible de nommer le Curateur public du Québec pour agir comme tuteur. Dans ce cas, le Curateur public du Québec ne peut pas refuser cette nomination et devra agir (articles 261 et 266 du Code civil du Québec).

Administration des biens (pouvoirs)

Choix de la pleine administration ou de la simple administration

Imposition de la simple administration

Lorsque vous préparez votre mandat de protection, vous choisissez les pouvoirs d’administration qu’aura votre mandataire.

Le tuteur a les pouvoirs conférés par la simple administration, et ce, suivant l’article 286 du Code civil du Québec, et devra donc obtenir certaines autorisations dans le cadre de l‘administration de vos biens.

Vous pouvez soit choisir la pleine administration et votre mandataire ne sera pas restreint dans ses pouvoirs pour l‘administration de vos biens, soit choisir la simple administration et votre mandataire devra obtenir certaines autorisations dans le cadre de l‘administration de vos biens.

Une situation fréquente suivant laquelle le tuteur doit obtenir une autorisation est la vente d’un immeuble lorsque sa valeur excède 40 000 $. Dans ce cas, le tuteur devra obtenir l’autorisation du tribunal pour aliéner ce bien et l’avis du conseil de tutelle sera également sollicité (article 289.1 du Code civil du Québec).

 

Attention : Depuis l’entrée en vigueur de la Loi visant à mieux protéger les personnes en situation de vulnérabilité en novembre 2022, toutes les curatelles (suivant lesquelles le curateur avait les pouvoirs de la pleine administration) sont devenues des tutelles et les tuteurs sous le nouveau régime ont maintenant les pouvoirs de la simple administration.

Mesures de surveillance du tuteur

Reddition de compte

Conseil de tutelle

Il est maintenant obligatoire de prévoir que le mandataire en fonction devra rendre compte de son administration à une personne et la fréquence de cette reddition de compte ne doit pas excéder 3 ans, et ce, suivant l’article 2166.1 alinéa 3 du Code civil du Québec. Il est possible d’inscrire que ce sera le Curateur public du Québec qui devra recevoir la reddition de compte.

Dans le cadre de la procédure d’ouverture de tutelle, plus précisément lors de l’assemblée de parents, d’alliés ou d’amis, un conseil de tutelle est proposé. Le conseil de tutelle a pour rôle de surveiller et conseiller le tuteur. Comme pour le tuteur, le tribunal confirme la composition du conseil de tutelle lorsqu’il rend son jugement pour l’ouverture de tutelle.

 

Suivant les articles 228 et 266 du Code civil du Québec, le conseil de tutelle est normalement formé de 3 membres et de 2 membres suppléants, mais il peut être parfois constitué d’une seule dans certaines circonstances (voir les articles 231 et 266 du Code civil du Québec).

Ce tableau est un résumé des principales différences entre la présence d’un mandat de protection et l’absence d’un mandat de protection, mais il existe bien sûr d’autres différences, sans oublier qu’il est possible, dans un mandat de protection, de guider son mandataire à la personne dans sa prise de décisions quant à vos soins en confirmant son opposition ou non à tout acharnement thérapeutique ou diagnostic.

Il est également possible de prévoir une procuration avec son mandat de protection, ce qui peut notamment avoir une utilité lors de la procédure d’homologation du mandat de protection. Pour plus d’information à ce sujet, nous vous invitions à consulter le blogue intitulé « L’utilisation de la procuration d’une personne en perte d’autonomie » sur notre site Internet en utilisant le lien suivant : https://www.beauchampgilbert.com/fr/blogue/lutilisation-de-la-procuration-dune-personne-en-perte-dautonomie.

Afin de discuter plus en détail du mandat de protection et de vos besoins à ce sujet, nous vous invitions à nous joindre et un notaire chez BEAUCHAMP GILBERT NOTAIRES prendra le temps d’analyser ces aspects avec vous.