Me Joëlle Tremblay, notaire

La protection des personnes vulnérables occupe une place très importante dans notre société, davantage lorsqu’une personne est en perte d’autonomie et qu’elle doit être déclarée inapte légalement. C’est la raison pour laquelle il existe des mécanismes de protection prévus par la loi et ces mécanismes sont principalement l’homologation du mandat de protection (en présence d’un mandat de protection) et l’ouverture d’une tutelle (en l'absence d’un mandat de protection).

Il est important de faire un léger survol de ce qu’est un mandat de protection. L’article 2166 du Code civil du Québec prévoit ce qui suit :

« Le mandat de protection est celui donné par une personne majeure en prévision de son inaptitude à prendre soin d’elle-même ou à administrer ses biens; il est fait par acte notarié en minute ou devant témoins. Il ne peut être fait conjointement par deux ou plusieurs personnes. »

Plusieurs différences existent entre les deux mécanismes de protection reconnus au Québec, créant d’importantes distinctions quant aux impacts sur l’administration des biens de la personne vulnérable et le consentement à ses soins. Regardons ensemble les principales différences à l’aide du tableau explicatif ci-bas

Homologation d’un mandat de protection

Ouverture d’une tutelle

Représentant légal

Mandataire

Tuteur

Lorsque vous préparez votre mandat de protection, vous nommez des personnes afin qu’elles administrent en votre nom vos biens et consentent en votre nom à vos soins dans le cas où vous deviendrez inapte.

Lorsqu’une personne devient inapte et qu’elle n’a pas signé de mandat de protection, il est nécessaire de lui nommer un tuteur.

 

Le tuteur est proposé dans le cadre de la procédure d’ouverture de tutelle, plus précisément lors de l’assemblée de parents, d’alliés ou d’amis. Par la suite, le tribunal confirme ou non cette nomination lorsqu’il rend son jugement pour l’ouverture de tutelle.

Vous pouvez nommer une seule personne pour agir comme mandataire ou plusieurs personnes en même temps.

Attention : il est possible de nommer deux tuteurs à la personne seulement lorsque les tuteurs sont les père et mère (article 268.1 alinéa 1 du Code civil du Québec).

Vous pouvez nommer une même personne pour agir comme mandataire aux biens (administration des biens) et mandataire à la personne (consentement aux soins) ou des personnes différentes.

Il est possible que soient nommées une même personne pour agir comme tuteur aux biens (administration des biens) et tuteur à la personne (consentement aux soins) ou des personnes différentes.

Il est fortement recommandé de nommer des mandataires remplaçants dans le cas où le mandataire nommé ne peut pas agir (ex. : en cas de décès, de renonciation, d’inaptitude).

Depuis l’entrée en vigueur de la Loi visant à mieux protéger les personnes en situation de vulnérabilité en novembre 2022, il est maintenant possible de nommer un tuteur remplaçant dans le cas où le tuteur nommé ne peut pas agir (ex. : en cas de décès, de renonciation, d’inaptitude).

Fait intéressant : il n’est pas possible de nommer le Curateur public du Québec pour agir comme mandataire.

Fait intéressant : il est possible de nommer le Curateur public du Québec pour agir comme tuteur. Dans ce cas, le Curateur public du Québec ne peut pas refuser cette nomination et devra agir (articles 261 et 266 du Code civil du Québec).

Administration des biens (pouvoirs)

Choix de la pleine administration ou de la simple administration

Imposition de la simple administration

Lorsque vous préparez votre mandat de protection, vous choisissez les pouvoirs d’administration qu’aura votre mandataire.

Le tuteur a les pouvoirs conférés par la simple administration, et ce, suivant l’article 286 du Code civil du Québec, et devra donc obtenir certaines autorisations dans le cadre de l‘administration de vos biens.

Vous pouvez soit choisir la pleine administration et votre mandataire ne sera pas restreint dans ses pouvoirs pour l‘administration de vos biens, soit choisir la simple administration et votre mandataire devra obtenir certaines autorisations dans le cadre de l‘administration de vos biens.

Une situation fréquente suivant laquelle le tuteur doit obtenir une autorisation est la vente d’un immeuble lorsque sa valeur excède 40 000 $. Dans ce cas, le tuteur devra obtenir l’autorisation du tribunal pour aliéner ce bien et l’avis du conseil de tutelle sera également sollicité (article 289.1 du Code civil du Québec).

 Attention : Depuis l’entrée en vigueur de la Loi visant à mieux protéger les personnes en situation de vulnérabilité en novembre 2022, toutes les curatelles (suivant lesquelles le curateur avait les pouvoirs de la pleine administration) sont devenues des tutelles et les tuteurs sous le nouveau régime ont maintenant les pouvoirs de la simple administration.

Mesures de surveillance du tuteur

Reddition de compte

Conseil de tutelle

Il est maintenant obligatoire de prévoir que le mandataire en fonction devra rendre compte de son administration à une personne et la fréquence de cette reddition de compte ne doit pas excéder 3 ans, et ce, suivant l’article 2166.1 alinéa 3 du Code civil du Québec. Il est possible d’inscrire que ce sera le Curateur public du Québec qui devra recevoir la reddition de compte.

Dans le cadre de la procédure d’ouverture de tutelle, plus précisément lors de l’assemblée de parents, d’alliés ou d’amis, un conseil de tutelle est proposé. Le conseil de tutelle a pour rôle de surveiller et conseiller le tuteur. Comme pour le tuteur, le tribunal confirme la composition du conseil de tutelle lorsqu’il rend son jugement pour l’ouverture de tutelle.

 Suivant les articles 228 et 266 du Code civil du Québec, le conseil de tutelle est normalement formé de 3 membres et de 2 membres suppléants, mais il peut être parfois constitué d’une seule dans certaines circonstances (voir les articles 231 et 266 du Code civil du Québec).

Ce tableau est un résumé des principales différences entre la présence d’un mandat de protection et l’absence d’un mandat de protection, mais il existe bien sûr d’autres différences, sans oublier qu’il est possible, dans un mandat de protection, de guider son mandataire à la personne dans sa prise de décisions quant à vos soins en confirmant son opposition ou non à tout acharnement thérapeutique ou diagnostic.

Il est également possible de prévoir une procuration avec son mandat de protection, ce qui peut notamment avoir une utilité lors de la procédure d’homologation du mandat de protection. Pour plus d’information à ce sujet, nous vous invitions à consulter le blogue intitulé « L’utilisation de la procuration d’une personne en perte d’autonomie » sur notre site Internet en utilisant le lien suivant : https://www.beauchampgilbert.com/fr/blogue/lutilisation-de-la-procuration-dune-personne-en-perte-dautonomie.

Afin de discuter plus en détail du mandat de protection et de vos besoins à ce sujet, nous vous invitions à nous joindre et un notaire chez BEAUCHAMP GILBERT NOTAIRES prendra le temps d’analyser ces aspects avec vous.

Me Kasandra Kutlesa, notaire

Commençons par une petite histoire. La sœur de Sophie décède dans un accident de voiture. Sophie découvre qu’elle est la bénéficiaire d’un REER que sa sœur détenait auprès d’une compagnie d’assurance. Sophie se questionne grandement quant à sa responsabilité pour le paiement des impôts suite au décaissement de ce REER. Elle se demande si, à titre de bénéficiaire, elle sera responsable du paiement de l’impôt ou si c’est la succession de sa sœur qui en sera responsable. Notre réponse à Sophie est assez simple ! En règle générale, le bénéficiaire désigné d’un REER ou d’un FERR recevra le REER ou le FERR, et ce libre d’impôt. Voici pourquoi.

En vertu des lois fiscales québécoises et fédérales[1], le défunt est réputé avoir disposé de ses actifs à sa juste valeur marchande, REER et FERR inclus, au moment du décès. Ainsi, la valeur du REER ou du FERR doit être incluse dans la déclaration fiscale de la défunte pour l’année de son décès. Par le fait même, la succession de la défunte sera responsable du paiement de la dette fiscale. Une telle interprétation des lois fiscales fut retenue dans plusieurs jugements[2], dont dans l’affaire Laforest c. Boudreault[3].

Dans cette affaire, le juge de première instance a établi que l’article 146 (8.8) a) de la Loi de l’impôt sur le revenu est clair. Il mentionne que la Loi « a pour effet de faire entrer le passif que constituent les impôts à payer dans le patrimoine du défunt puisqu’il est réputé avoir encaissé les REER le jour avant son décès. S’agissant d’un passif créé le jour précédant le décès, il est donc un passif de la succession[4].» Ainsi, la dette fiscale résultant de l’encaissement du REER ou du FERR n’est pas de la responsabilité du bénéficiaire du REER ou du FERR, mais bien de la succession de la défunte. Ce jugement fut porté en appel. En cette deuxième instance, les juges sont d’avis que le juge de première instance n'a commis aucune erreur en concluant que la succession était responsable du paiement de la dette d'impôt et que la responsabilité ultime de la dette fiscale n'est pas celle du bénéficiaire, mais bien de la succession[5].

Donc, la règle générale est que la responsabilité des impôts découlant du REER/FERR est celle de la succession de la défunte. Toutefois, il est important de noter qu’il existe des exceptions à ce principe (par exemple le cas d’une succession insolvable), d’où l’importance, lors de la rédaction d’un testament, de dresser une liste détaillée de vos avoirs pour que le notaire puisse en prendre connaissance et vous conseiller adéquatement. Si vous avez besoin d’aide avec la confection de votre testament ou si vous avez des questions dans le cadre de la liquidation d’une succession. Nous sommes là pour vous! Consultez-nous : info@beauchampgilbert.com. Un membre de notre équipe se fera un plaisir de communiquer avec vous.

 [1] Art. 146 (8.8) a) de la Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. (1985), ch. 1 (5e suppl.) et art. 915.2 Loi sur les impôts, RLRQ, c. I-3.

[2] Slater c. Klassen, 2000 DTC 6336; Curley v. MacDonald, 2000 CanLII 22836 (ON SC); Verville c. Industrielle-Alliance (L’), compagnie d’assurance sur la vie, J.E. 99-472 (QC C.S.).

[3] Laforest c. Boudreault, 2015 QCCA 162.

[4] Boudreault c. Laforest, 2013 QCCS 4575, para. 73-73.

[5] Ibid, note 3.

 

Me Joëlle Tremblay, notaire

Le décès, au même titre que le divorce, dissout l’union qui unissait deux personnes mariées. Eh oui, le décès est également un motif de dissolution du mariage ! Plusieurs conséquences peuvent découler du décès d’un conjoint marié et le testament peut être un outil fort important afin de planifier la dissolution de cette union. Dans un tel cadre de dissolution, la présence d’un contrat de mariage ou non viendra également « changer la donne » dans les calculs entourant le partage des biens des époux. Voyons ensemble comment cette dissolution se concrétisera pour le conjoint survivant.

Présence ou non d’un contrat de mariage ?  

Au Québec, peu importe le régime matrimonial choisi par des conjoints mariés, il y aura toujours deux composantes qui s’appliqueront à ces derniers à la dissolution de leur union, soit le patrimoine familial et ensuite le régime matrimonial. Ainsi, avant tout, lors du décès d’un défunt marié, il est important de vérifier si les époux avaient conclu un contrat de mariage devant un notaire. En effet, le régime matrimonial sera établi dans le contrat de mariage ou par la loi, si les conjoints n’ont pas signé de contrat de mariage.

Si un contrat de mariage a été signé, il établira le régime matrimonial des époux et le partage des biens se fera selon ce choix de régime. Si les époux n’ont pas signé de contrat de mariage, le partage des biens se fera selon le régime légal. Le régime qui s’appliquera sera normalement celui du lieu du domicile des époux au moment de leur union.

Patrimoine familial et régimes matrimoniaux

Le patrimoine familial est une mesure d’ordre public et tous les couples mariés ne peuvent s’en dissocier. C’est le régime primaire, et ses règles doivent être respectées, avant même de parler du régime matrimonial du couple.

Suivant le Code civil du Québec “Le patrimoine familial est constitué des biens suivants dont l’un ou l’autre des époux est propriétaire : les résidences de la famille ou les droits qui en confèrent l’usage, les meubles qui les garnissent ou les ornent et qui servent à l’usage du ménage, les véhicules automobiles utilisés pour les déplacements de la famille et les droits accumulés durant le mariage au titre d’un régime de retraite.”

Les autres biens des époux non inclus dans le patrimoine familial seront traités suivant le régime matrimonial des époux et au Québec, nous retrouvons principalement deux régimes matrimoniaux, soit la séparation de biens et la société d’acquêts, bien que d’autres régimes puissent aussi s’appliquer, par exemple la communauté de biens ou un régime matrimonial étranger.

Pour être mariés en séparation de biens, les conjoints doivent avoir signé un contrat de mariage devant un notaire. Suivant le régime de la séparation de biens, il n’y a aucun partage de biens, chaque époux conserve ses propres biens. Il faut alors seulement procéder au partage de la valeur des biens composant le patrimoine familial.

Si aucun contrat de mariage n’est signé par les époux, le régime matrimonial sera la société d’acquêts, en principe. Dans ce cas, il faudra faire deux partages, soit celui de la valeur des biens inclus dans le patrimoine familial et celui de la valeur des biens inclus dans la société d’acquêts, laquelle consiste aux biens non inclus dans le patrimoine familial.

Dans le cas du décès d’un conjoint marié, vous l’aurez deviné, c’est le conjoint survivant et la succession du conjoint décédé qui devront procéder à ce(s) partage(s). Ce(s) partage(s) permettra(ont) de déterminer lequel du conjoint survivant ou de la succession devra verser une somme à l’autre pour rétablir le déséquilibre monétaire entre les deux.

Succession testamentaire VS succession ab intestat

Il faut faire la différence entre une succession testamentaire, soit une personne qui décède avec un testament, et une succession ab intestat, soit une personne qui décède sans testament. Au Canada, plus de 50 % de la population n’a pas signé de testament. 50 %, c’est énorme ! Mais quel est l’avantage de faire un testament si nous sommes mariés ? Contrairement aux croyances populaires, au Québec, même si une personne est mariée, son conjoint n’héritera pas seul si aucune disposition testamentaire ne prévoit ce scénario. Dépendamment de la situation familiale du défunt, le conjoint marié héritera avec les enfants du défunt ou à défaut d’enfants, avec les parents et frères et sœurs du défunt.

Pour éviter que votre conjoint n’hérite pas seul, il est possible de prévoir dans votre testament que votre conjoint sera l'unique héritier de votre succession. De cette façon, votre conjoint héritera seul de vos biens et ne devra pas payer une somme à votre succession pour le partage du patrimoine familial et du régime matrimonial, sauf quelques exceptions, notamment si la succession est insolvable. Dans ce dernier cas malheureux, il se pourrait que l’époux survivant se voit contraint de payer une somme à la succession suite au partage de la valeur des biens du patrimoine familial et du régime matrimonial, puisque les créanciers du défunt sont en droit de recevoir ces sommes qui serviront au paiement des dettes de celui-ci.

Nous en profitons pour faire un petit rappel important sur les conjoints de fait : en l’absence de dispositions testamentaires désignant le conjoint de fait comme héritier, ce dernier ne sera pas héritier de votre succession, même si vous êtes ensemble depuis des dizaines d’années. 

Nous ne le répéterons jamais assez que le testament est le seul outil qui vous assure du choix de vos héritiers !

Régime enregistré d'épargne-retraite (ci-après “REER”) VS legs à un conjoint

L'un des avantages de léguer son REER à son conjoint est qu’il sera possible de reporter l’impact fiscal lié à ce legs à un moment ultérieur. Normalement, l’entièreté des REER d’un défunt doit être imposée suivant son taux d’imposition à la date de son décès. Lorsque la personne qui reçoit les REER du défunt se qualifie de conjoint au sens fiscal, il est possible de se prévaloir d’un avantage fiscal suivant lequel cette imposition sera reportée à des moments ultérieurs, comme au décaissement des REER par le conjoint survivant ou à son propre décès.

Pour se prévaloir d’un tel transfert, il peut être exigé de produire certains documents dans un délai spécifique. Malgré qu’un conjoint de fait peut se qualifier pour un tel transfert, certaines exigences devront être respectées. Pour de plus amples renseignements, il est fortement conseillé de consulter son fiscaliste pour connaître toutes les composantes et exigences afin que ce transfert puisse avoir lieu avec le moins d’impact fiscal.

Obligation alimentaire

L’article 684 du Code civil du Québec prévoit que le conjoint survivant d’un défunt marié, créancier d’aliments (par exemple, qui reçoit une pension alimentaire), peut réclamer une obligation alimentaire à la succession de ce défunt. C’est la loi qui prévoit comment sera calculée cette somme et comment elle sera payée. Encore une fois, il faut faire preuve d’une grande vigilance puisque la réclamation au liquidateur de la succession pour obtenir cette somme doit être faite dans les 6 mois du décès du conjoint.

Conclusion

Comme vous pouvez le constater, ce n’est pas parce que vous êtes marié que votre liquidation de succession sera plus simple. Notre plus grande recommandation : consultez un notaire avant de faire votre testament. Le notaire vous conseillera adéquatement sur la façon de léguer vos biens avec le moins d’impact négatif possible.

Venez à notre rencontre, nos notaires connaissent bien le domaine des successions, ils pourront vous conseiller avant ou après un décès : info@beauchampgilbert.com

 

Me Cindy Gilbert, notaire

Remettre l’argent aux héritiers avant la fin de la liquidation de la succession, oui ou non?

La liquidation des successions est un long processus, qui apporte son lot de frustrations. Les délais sont interminables avant qu’un héritier puisse recevoir sa part d’héritage. Le liquidateur qui veut bien faire, doit respecter plusieurs étapes cruciales avant de pouvoir libérer les actifs du défunt, dans un premier temps, pour ne pas lui-même être tenu personnellement responsable des dettes du défunt, mais aussi, pour ne pas engager, non plus, la responsabilité des héritiers, au-delà des biens qu’ils recueillent. C’est donc normal que le liquidateur refuse de remettre des sommes aux héritiers en cours de liquidation.

Le Code civil du Québec est très clair dans les démarches que le liquidateur doit suivre pour ne pas engager sa responsabilité. La première, et une des plus importantes étapes de la liquidation des successions, est la confection de l’inventaire de l’actif et du passif du défunt. L’inventaire détermine tous les biens que possédait le défunt, mais aussi toutes ses dettes au jour de son décès. Il est adéquat par la suite de poser un diagnostic de la succession : succession solvable, succession non manifestement solvable et succession manifestement insolvable. Selon ce diagnostic, la succession ne se liquidera pas tout à fait de la même façon.

Une fois que l’inventaire est signé par le liquidateur ou les héritiers, des avis de clôture d’inventaire doivent être publiés au Registre des droits personnels et réels mobiliers (RDPRM) et dans un journal circulant dans la localité du domicile du défunt. Ces avis permettent d’informer les créanciers, en général, du décès du défunt. Si le créancier veut alors faire valoir sa créance, il pourra le faire auprès du liquidateur ou des héritiers.

L’article 808 du Code civil prévoit que le liquidateur peut commencer à payer les créanciers après que les avis de clôture aient été publiés, en autant que la succession s’avère manifestement solvable. Si la succession s’avère insolvable, bien sûr, la loi prévoit d’autres démarches devant le tribunal. Cela pourra faire l’objet d’un autre article. À ce moment, il est clair que le liquidateur devra suivre une procédure spéciale et il n’est aucunement autorisé à payer quelques dettes avant d’avoir eu un jugement du tribunal.

Le fait pour le liquidateur de remettre des sommes d’argent aux héritiers avant d’avoir dressé l’inventaire et publié les avis de clôture n’est pas sans conséquence. En effet, la loi considère alors que sans inventaire, il y a confusion des biens entre ceux du défunt et ceux de l’héritier. Si les dettes du défunt sont alors plus importantes que son actif, les créanciers auront la possibilité de saisir, par exemple, les biens personnels de l’héritier.

Bien qu’il y ait une croyance à l’effet que le liquidateur a six mois pour dresser un inventaire, il n’en est rien. Ce délai de 6 mois vise plutôt l’option offerte aux successibles. En effet, si un successible veut renoncer à une succession, il doit le faire dans les 6 mois du décès. Pour prendre une décision en ce sens, il faut bien sûr se référer à un inventaire. Par contre, la réalité est toute autre! Dresser un inventaire dans un délai de 6 mois est presque impossible! Juste attendre les feuillets fiscaux pour finaliser les impôts du défunt peuvent prendre des mois… Comme l’inventaire doit refléter un portrait exact de la situation du défunt à son décès, il est essentiel que les impôts aient été faits. Ainsi, nous allons le plus souvent dresser un bilan sommaire de l’actif et du passif du défunt avec les seules informations obtenues dans ce délai de six mois, question que les successibles puissent opter. Mais l’inventaire, tel que le Code civil le requiert peut prendre beaucoup plus de temps, voire parfois plus d’un an, dans certaines successions.

Une fois que l’inventaire est signé et que les avis de clôture ont été publiés, la liquidation n’est pas terminée, malgré ce qu’on peut en penser. Oui, il y a le côté civil, mais il y a le côté fiscal également à respecter. Les lois fiscales, provinciales et fédérales, prévoient qu’un liquidateur ne peut distribuer de biens avant d’avoir obtenu les certificats de décharge (fédéral) et de distribution (provincial). Encore une fois, ces certificats font office de protection pour le liquidateur. Si un liquidateur fait remise de biens de la succession avant d’avoir obtenu ces deux certificats, il pourra être tenu PERSONNELLEMENT responsable des dettes fiscales, s’il y a lieu. Un pensez-y-bien pour le liquidateur!

Nul doute qu’il est fort possible que le liquidateur vous refuse une remise de votre legs tant qu’il n’a pas obtenu les certificats en question. Le testament a beau prévoir que vous devrez recevoir votre legs de 100 000$ dans les 6 mois du décès, et bien, ne vous surprenez pas qu’il n’en soit pas ainsi!

Les délais d’obtention pour ces deux certificats sont très longs! D’abord, rien ne sert de les demander tant que les impôts n’auront pas été produits. Ils ne seront pas émis avant que tout ait été cotisé, également. Il faut comprendre que pour les ministères du Revenu provincial et fédéral, c’est l’ultime chance de vérifier tout le dossier fiscal des dernières années du défunt. Les délais d’attente sont interminables, au-delà de 6 mois présentement, une fois que les impôts sont déposés et cotisés. Il faut s’armer de patience!

Cette démarche n’a pas à être entreprise si le seul héritier est également liquidateur, puisque l’héritier est de toute façon responsable des dettes du défunt. Dans son cas, pour sa protection, seuls un inventaire signé et l’avis de clôture publié lui permettront de ne pas être responsable des dettes du défunt au-delà des avoirs qu’il recueille.

En résumé, il n’est pas rare de voir des héritiers exaspérés de ne pas recevoir leur legs dans des délais acceptables, mais il peut s’avérer normal d’attendre si longtemps. La liquidation d’une succession peut être un long processus, et pour certaines successions, il ne faut pas se surprendre si les délais prennent plus d’un an, même plus de deux ans!

La liquidation d’une succession n’est pas une tâche simple. Vous avez besoin d’aide? Nous sommes là pour vous, surtout que c’est notre principale spécialité! Consultez-nous : info@beauchampgilbert.com.

Me Kasandra Kutlesa, notaire

Vous vous demandez si un de vos proches a fait un testament?

Il est possible d’effectuer une recherche au Registre des dispositions testamentaires de la Chambre des notaires du Québec et au Registre des testaments du Barreau du Québec.

Cette recherche vous permettra d’obtenir un certificat de recherche qui vous confirme si un testament a été inscrit à ces registres. Si tel est le cas, vous obtiendrez les coordonnées du notaire ou de l’avocat qui conserve le document recherché et vous pourrez le récupérer auprès de ce professionnel.

Pourquoi est-il nécessaire d’effectuer des recherches testamentaires ?

Les recherches testamentaires sont une étape cruciale dans le processus de la liquidation d’une succession. Elles permettent de retracer et de confirmer que vous êtes en possession de la dernière disposition testamentaire de la personne décédée, reçue en minute ou conservée en dépôt par un notaire ou un avocat. Le certificat de recherche n’indiquera pas tous les testaments faits antérieurement par le défunt.

J’ai trouvé le testament notarié de ma mère, dois-je faire les recherches testamentaires?

Oui, vous devrez effectuer les recherches testamentaires afin de valider que vous êtes en possession du dernier testament de votre mère.

Dans le processus de la liquidation de succession, est-ce que les recherches testamentaires me seront demandées par certaines institutions?

Les recherches testamentaires seront demandées par les différents intervenants de la succession pour valider qu’ils ont en main le dernier testament de la personne décédée ou encore pour valider que la personne n’avait pas de testament.

À titre informatif, dans le processus de la liquidation d’une succession, les recherches testamentaires seront, entre autres, demandées par les institutions financières, l’Agence du Revenu du Canada, Revenu Québec, et encore plus... Les recherches testamentaires sont une étape indispensable et on peut comprendre pourquoi! C’est l’élément qui nous permet d’entamer la liquidation de la succession avec le bon liquidateur et les bons héritiers.

Comment effectuer des recherches testamentaires ?

Au Québec, nous avons deux registres, soit le Registre des dispositions testamentaires de la Chambre des notaires du Québec et le Registre des testaments du Barreau du Québec. Ils sont deux registres complètement distincts et indépendants. Ainsi, vous devrez soumettre deux demandes, une pour chaque registre.

La demande peut se faire en ligne ou par la poste. Sinon, vous pourrez également vous adresser au notaire de votre choix, qui s’occupera d’effectuer les recherches pour vous.

Quels documents et informations sont nécessaires pour effectuer une recherche testamentaire?

Pour faire la demande de recherche testamentaire, vous devez absolument fournir une copie de l’acte de décès ou du certificat de décès délivré par le Directeur de l’état civil. Il est important de noter que la preuve de décès du salon funéraire ne sera pas acceptée.

Vous aurez également besoin des informations suivantes sur la personne décédée :

ses noms;sa date de naissance et sa date de décès;son état civil;son numéro d’assurance sociale;ses anciennes adresses.Le notaire a le privilège, cependant, de pouvoir demander les recherches testamentaires sur la base de la simple attestation de décès de la maison funéraire ou du formulaire gouvernemental Déclaration de décès (DEC-100). Il faut comprendre, toutefois, que le notaire ne remettra pas les recherches à ses clients tant que le certificat ou l’acte de décès du Directeur de l’état civil ne lui sera pas fourni. Mais ça accéléra le processus à savoir quel est ce dernier testament.

Est-ce qu’il est possible d’avoir accès aux recherches historiques des registres testamentaires?

Dans l’affaire de la Succession de Chekir[1], il a été établi que l'existence et l'inexistence de dispositions testamentaires antérieures sont couvertes par le secret professionnel. Ainsi, le tribunal estime qu’il y a lieu d’appliquer à la demande de recherche historique les mêmes conditions qui sont applicables à la demande compulsoire.

En raison du caractère d'exception de la demande compulsoire, le secret professionnel sera levé s'il est dans l'intérêt de la justice de le faire. Ainsi, « pour établir cet intérêt de la justice, le demandeur doit démontrer, d'une part, qu'il a de sérieuses raisons de croire qu'il a un intérêt juridique à contester la validité du dernier testament et, d'autre part, qu'un doute sérieux existe quant à la validité du dernier acte testamentaire.»[2]

Pour cette raison, la Chambre des notaires du Québec émettra un certificat mentionnant, s’il y a lieu, uniquement le dernier testament signé devant notaire fait par le défunt.

Qu’arrive-t-il si les recherches testamentaires sont non concluantes?

Dans le cas où les recherches testamentaires se montrent non concluantes, nous serons en présence d'une succession ab intestat, communément appelée une succession légale ou encore une succession sans testament. Ainsi, la succession sera dévolue selon les règles prévues au Code civil du Québec. La prochaine étape sera d’établir les héritiers légaux de la succession, par une déclaration d’hérédité et une nomination d’un liquidateur, le cas échéant.

Les recherches testamentaires sont une étape essentielle dans le processus de la liquidation d’une succession. Que les recherches soient concluantes ou non, venez rencontrer l’équipe chez BEAUCHAMP GILBERT NOTAIRES, ils pourront vous accompagner dans les premières étapes de la liquidation d’une succession.

 [1] Succession Chekir, 2022 QCCS 4631.

[2] Succession Chekir, 2022 QCCS 4631, para 73.

Me Joëlle Tremblay, notaire

Il y a plusieurs notions juridiques importantes à connaître lorsqu’un mineur hérite d’une succession, autant si vous êtes un liquidateur d’une succession, un tuteur à un enfant mineur ou un proche parent d’un enfant mineur. Cet article traitera des principales notions à retenir si vous vous retrouvez dans l’une de ces situations ou si vous conseillez l’un de vos clients se retrouvant dans l’une de ces situations.

Acceptation réputée suivant le Code civil du Québec

Avant tout, il est important de mentionner que le Code civil du Québec prévoit que les mineurs sont réputés avoir accepté la succession, sauf s’il y a renonciation par le tuteur. Dans ce dernier cas, afin de procéder à une telle renonciation, il faut obtenir l’autorisation du conseil de tutelle, ce qui implique la convocation à une assemblée de parents, d’alliés ou d’amis, dans le but de constituer ce conseil de tutelle, puisqu’il y a de fortes chances qu’il ne soit pas encore formé à ce stade.

Aliénation des biens de la succession

Dans le cadre de son administration des biens de la succession, il y a de fortes chances que le liquidateur doive procéder à l’aliénation de biens composant la succession. Le Code civil du Québec prévoit que le liquidateur a, à la base, des pouvoirs de simple administration et qu’il peut, avec l’autorisation du bénéficiaire ou, si celui-ci est empêché, avec celle du tribunal, aliéner le bien, autant immeuble que meuble, à titre onéreux. Toutefois, il peut aliéner seul un bien susceptible de se déprécier rapidement ou de dépérir.

En conséquence, comme le mineur ne peut consentir à une telle aliénation et donc que l’autorisation du bénéficiaire ne peut être obtenue, le liquidateur se voit dans l’obligation d’obtenir du tribunal l’autorisation pour vendre ces biens. Lors de la préparation de son testament, cette situation peut être évitée en prévoyant que le liquidateur sera chargé de la pleine administration dans le cadre de la liquidation de la succession. De cette façon, le liquidateur pourra procéder, sans autorisation du tribunal, à la vente des biens composant la succession, même si un mineur est héritier.

Déclaration au Curateur public du Québec

Suivant le Code civil du Québec, le liquidateur a l’obligation d’informer le Curateur public du Québec lorsqu’un enfant est héritier d’un ou des biens ayant une valeur supérieure à 25 000 $ et de lui indiquer la valeur des biens légués. Présentement, aucun délai n’est imposé au liquidateur pour remplir cette obligation, mais règle habituelle, il en informe le Curateur public du Québec avant de faire la délivrance des biens afin de lui permettre d’informer le tuteur de ses devoirs avant qu’il ne commence à administrer les biens du mineur.

Toutefois, la Loi visant à mieux protéger les personnes en situation de vulnérabilité, laquelle entrera en vigueur à compter du 1er novembre 2022, prévoit que ces exigences changeront. En effet, le Curateur public du Québec devra être avisé lorsqu’un enfant est héritier d’un ou des biens ayant une valeur supérieure à 40 000 $, et ce, au moins 15 jours avant la remise de ce(s) bien(s). Un délai a donc été ajouté, ce qui viendra enlever toute confusion à cet égard.

Nomination d’un tuteur autre que les parents

Les père et mère sont de plein droit tuteurs à leur enfant mineur (tuteur légal) et exercent cette charge ensemble, sauf certaines exceptions telles que le décès de l’un des parents et dans ce cas, le parent survivant exerce seul cette charge.

Les père et mère peuvent nommer un tuteur à leur enfant mineur, soit par testament, mandat de protection ou déclaration transmise au Curateur public du Québec (tuteur datif). Lorsqu’un tuteur a été nommé par le dernier parent vivant dans son testament, ce dernier entre en fonction sans nécessité de procéder à une procédure judiciaire. Si aucun tuteur n’a été nommé par le dernier parent vivant, il sera alors nécessaire de procéder à la nomination d’un tuteur et cela doit se faire par l’entremise d’une procédure devant notaire ou devant tribunal, suite à la tenue de l’assemblée de parents, d’alliés ou d’amis. Il va sans dire qu’une telle procédure est beaucoup plus coûteuse et plus complexe que de faire la nomination d’un tuteur dans son testament.

Conseil de tutelle

Lorsqu’un enfant hérite d’un ou des biens ayant une valeur supérieure à 25 000 $, le Code civil du Québec prévoit qu’il faut constituer un conseil de tutelle, composé d’un certain nombre de personnes et ayant pour but de surveiller la tutelle. Comme mentionné précédemment, à compter du 1er novembre 2022, ce montant plancher augmentera à 40 000 $. Il existe des solutions afin de se soustraire à cette obligation, notamment en faisant un testament prévoyant une fiducie en faveur de votre enfant mineur ou une administration prolongée ou post-liquidation donnant à un tiers les pouvoirs d’administrer les biens légués à votre enfant mineur pour une certaine période.

Il est donc important, notamment lorsqu’une personne a un enfant mineur, qu’elle s’assure que toutes les mesures de protection soient mises en place afin de protéger son enfant advenant son décès. Cela passe d’abord par une consultation avec son notaire afin de discuter de sa situation et de procéder à la préparation des documents nécessaires, notamment son testament.

Vous êtes liquidateur d’une succession, vous êtes tuteur d’un enfant mineur ou vous êtes proche parent d’un enfant mineur dont les parents sont décédés ou vous conseillez l’un de ces personnes et vous désirez discuter de cette situation avec nous afin de vous assurer de respecter vos obligations légales ou de connaître vos droits ? Venez rencontrer l’un de nos notaires chez BEAUCHAMP GILBERT NOTAIRES, il vous accompagnera dans votre situation.

 

 

 

Me Marie-Ève Bercier, notaire

Ma mère est inapte, dois-je quand même faire homologuer son mandat de protection si j’ai une procuration?

Quand est-ce que ma procuration perd sa validité si mon père est inapte?

Est-ce que je peux continuer d’administrer les biens de ma tante en attendant le jugement pour l’homologation de son mandat?

Ce sont les questions les plus fréquemment posées par nos clients lorsque les personnes qui leur sont chères sont en perte d’autonomie et qu’ils détiennent des procurations pour elles. Afin de les aider à voir à la gestion des affaires courantes de ces personnes, voici nos réponses à ces questions.

1. La procuration

La procuration, dont les assises juridiques se retrouvent aux articles 2130 et suivants du Code civil du Québec (ci-après C.c.Q.), est un outil qui permet à une personne, appelée le mandataire, d’agir pour une autre, appelée le mandant, dans l’accomplissement de certains actes.  Il est présumé par tous que le mandataire agit suivant les instructions et avec le consentement du mandant. 

La procuration peut être générale, ce qui permet au mandant d’être représenté pour divers actes de simple administration.  Par exemple, le renouvellement d’une police d’assurance, le paiement d’un loyer, l’achat de nourriture ou de vêtements.  La procuration peut également être spéciale permettant, cette fois, au mandant, d’être représenté pour accomplir un acte spécifique. Parmi les actes relevant de la pleine administration, nous retrouvons le plus souvent la vente d’un immeuble. 

Sachez que le mandant peut révoquer la procuration qu’il a donnée à tout moment et pour n’importe quelle raison.

2. La perte d’autonomie

La perte d’autonomie est souvent progressive, il arrive donc qu’à un certain moment, le mandant perde l’aptitude à donner des instructions à son mandataire ou même à consentir aux actes effectués pour lui.  C’est à ce moment-là que la procuration cesse de produire ses effets.  Chaque mandataire doit être vigilant et s’assurer que le mandant est bien apte à lui donner ses directives.  Si tel n’est pas le cas, il doit cesser d’utiliser la procuration puisqu’elle n’est plus valide. Du moins, les démarches pour l’homologation d’un mandat de protection ou de l’ouverture d’un régime de protection doivent être débutées pour pouvoir, dans l’intervalle, continuer à utiliser la procuration. Nous traitons de cette situation ci-après.

Il est fort possible que certaines institutions, financières ou autres, questionnent l’utilisation de la procuration et tentent de communiquer avec le mandant pour constater son aptitude.  Il est tout à fait normal pour eux de vérifier que la procuration est utilisée en bonne et due forme et de vous demander de voir à instaurer un régime de protection si le mandant ne semble pas apte. Il ne faut pas s’en surprendre!

En présence de maladies dégénératives, il est difficile de savoir à quel moment la personne en perte d’autonomie n’est plus en mesure de prendre des décisions pour elle-même.  L’avis d’un médecin ou d’un travailleur social peut être très utile dans ces situations.   

2.1 Le régime de protection

Lorsqu’un médecin et un travailleur social arrivent à la conclusion qu’une personne est inapte, il est temps de voir à sa protection.  Il faudra donc homologuer son mandat de protection si elle en a signé un ou lui ouvrir un régime de protection (tutelle ou curatelle), si au contraire, elle n’a pas signé de mandat de protection.

2.2 Que faire en attendant?

Ce moment est critique puisqu’il est évident que le mandant n’a pas la capacité d’agir pour lui-même ni de donner des instructions à son mandataire, cependant, la mise en place d’un régime de protection est un processus qui peut s’étendre sur plusieurs mois. Le législateur a donc prévu certaines façons de conserver le statu quo tout en obligeant le mandataire à voir à l’instauration d’un régime de protection.

Ainsi, dès que la demande en homologation du mandat ou la demande en ouverture du régime de protection est déposée au tribunal ou le sera de façon imminente, la gestion des affaires courantes de la personne en vue d’être déclarée inapte peut se poursuivre par la personne qui possède déjà un mandat (procuration) à cet effet. Les articles 2167.1, al. 2 et 273 C.c.Q. permettent au détenteur d’une procuration de continuer d’agir en vertu des pouvoirs qui lui avaient été conférés en attendant que le jugement soit rendu.  Le mandataire qui agissait en vertu d’une procuration non révoquée, ni en voie de l’être, conserve les pouvoirs que la procuration lui conférait en attendant que le processus d’homologation du mandat ou de l’ouverture d’un régime de protection soit finalisé.

3. Clin d’œil aux situations où il n’y a pas de procuration

3.1 Direction de la famille

S’il n’y a pas de procuration et que la personne ne peut manifester sa volonté en temps utile, il ne faut pas oublier que le législateur a prévu un mandat présumé donné par un époux à l’autre lorsque les actes devant être accomplis relèvent de la direction morale et matérielle de la famille ou des pouvoirs que lui attribue son régime matrimonial. (Art. 398, 443 et 444 C.c.Q.)

3.2 Consentement aux soins

Également, concernant les soins de santé requis par le majeur qui ne serait pas protégé par un régime de protection, le législateur a prévu que la famille, un proche parent ou une personne démontrant de l’intérêt pour ce majeur pouvait consentir aux soins requis par son état de santé. (Art. 15 C.c.Q.)

En conclusion, il faut retenir que la procuration a ses limites. Un jour ou l’autre, devant l’inaptitude d’une personne, il faudra procéder à l’homologation du mandat de protection ou à l’ouverture d’un régime de protection, même en présence d’une procuration. Autrement, le mandataire de la procuration agirait sans autorisation légale et ses gestes et actions pourraient être annulés.

Vous désirez en savoir davantage sur la procuration, l’institution financière ne veut plus reconnaitre cette procuration, vous ne savez pas si vous pouvez poser un geste en particulier puisqu’une personne de votre entourage est en perte d’autonomie, nous sommes là vous vous aider. Communiquez avec notre étude à  info@beauchampgilbert.com

 

 

 

 

 

 

Me Kasandra Kutlesa, notaire

NON ! Les volontés de mon père n’ont pas été respectées.

IMPOSSIBLE! Ma mère ne voulait pas tout laisser à son conjoint de fait.  

Malheureusement, lors de la liquidation d’une succession, ce sont des commentaires que l’on entend régulièrement. Vous vous en doutez, au décès du testateur, il est trop tard pour faire des changements au testament. Au moment de la rédaction d’un testament, certains éléments, comme l’impact du partage du patrimoine familial et du régime matrimonial et la responsabilité des frais, des dettes et des charges fiscales, sont souvent négligés ou carrément oubliés. Les conséquences de ces oublis peuvent modifier substantiellement les volontés du testateur, d’où l’importance de bien conseiller son client. Commençons par le partage du patrimoine familial et du régime matrimonial.

1. Le partage du patrimoine familial et du régime matrimonial

Le décès de l’un des époux provoque la dissolution du mariage, menant ainsi au calcul du partage du patrimoine familial et du régime matrimonial. S'il n'est pas pris en considération lors de la rédaction du testament, ce calcul peut grandement modifier les volontés du testateur. En effet, un conjoint survivant peut à la fois réclamer la valeur du bien telle qu’elle résulte de son droit de partage dans le patrimoine familial et du régime matrimonial ET son droit d’héritier ou de légataire, puisque rien ne s’oppose à un tel cumul. Ce principe est communément appelé le « double dipping ». Pour contrer les effets de ce double bénéfice, dans l’affaire Choinière (Succession de)[1], la cour a statué sur la validité d’un legs conditionnel à la renonciation aux droits dans le partage du patrimoine familial. Ainsi, il est primordial pour le notaire d’informer son client des effets de ce calcul afin qu’il puisse faire un choix éclairé quant à l’attribution de ce type de legs.

Je vous présente deux exemples de clauses qui permettent d’éviter le « double dipping ».

LEGS CONDITIONNEL À LA RENONCIATION AU PARTAGE DES ACQUÊTS

Tous les legs faits à {. . .} sont faits à la condition qu’[il][elle] renonce au partage des acquêts.

LEGS CONDITIONNEL À LA RENONCIATION DU PATRIMOINE FAMILIAL ET DES ACQUÊTS

Tous les legs faits à {. . .} sont faits à la condition qu’[il][elle] renonce à ses droits dans le patrimoine familial ou dans la créance issue du partage du patrimoine familial et au partage des acquêts.

2. La responsabilité des frais, des dettes et des charges fiscales

La responsabilité des frais, des dettes et des charges fiscales est un autre élément important à prendre en considération lors de la rédaction d’un testament. Si ces responsabilités, quant à un legs, ne sont pas prises en compte, elles peuvent substantiellement modifier les volontés du testateur.

Voici une illustration concrète de l’impact de l’oubli d’une telle clause.

Madame X, à son décès, a un patrimoine successoral net de 500 000 $, qui inclut une maison d’une valeur de 500 000 $ avec une hypothèque de 200 000 $ et un compte bancaire d’un montant de 200 000 $. Elle fait un legs à titre particulier à son conjoint de sa maison de 500 000$ et le résidu est divisé entre ses deux enfants.

Dans la première situation, Madame X prévoit dans son testament, que les frais, les dettes et les charges fiscales de l’immeuble sont à la charge du conjoint.  Les légataires recevront les sommes suivantes :

Conjoint : 300 000 $ (maison de 500 000 $ - hypothèque de 200 000 $)

Enfant 1 : 100 000 $ (résidu de 200 000 $/2)

Enfant 2 :  100 000 $ (résidu de 200 000 $/2)

Dans la deuxième situation, Madame X ne prévoit pas dans son testament, que les frais, les dettes et les charges fiscales de l’immeuble sont à la charge de son conjoint. Ainsi, la succession se voit responsable du paiement de l’hypothèque.

Voici ce qui résulte de ce scénario :

Conjoint : 500 000$ (maison de 500 000 $ sans déduction de l’hypothèque)

Enfant 1 : 0 $ (résidu de 200 000 $ - hypothèque de 200 000 $ /2)

Enfant 2 :  0 $ (résidu de 200 000 $ - hypothèque de 200 000 $ /2)

En conséquence, dans la deuxième situation, les enfants n’hériteront de rien, ce qui ne traduit fort probablement pas les volontés de la cliente. Je vous présente un exemple de clause qui permet d’éviter la situation de Madame X dans des circonstances similaires.

RESPONSABILITÉ DES DETTES ET DES CHARGES FISCALES GREVANT LES LEGS PARTICULIERS

Les legs particuliers prévus au présent testament sont faits sous condition que mes légataires assument les hypothèques et autres charges qui affectent les biens légués, que mes légataires obtiennent des créanciers la libération de ma succession et qu’ils paient à ma succession toute conséquence fiscale liée à la disposition réputée des biens visés en vertu des lois fiscales et dues à mon décès.

Lors d’un décès, il est trop tard pour faire des changements à notre testament, d’où la raison pour laquelle nous soulignons à nos clients l’importance de revoir régulièrement leur testament, non seulement pour s’assurer que leurs volontés testamentaires restent inchangées, mais également pour s’assurer que leur testament évolue avec leurs propres situations et besoins ainsi qu’avec les courants jurisprudentiels et doctrinaux. Bien trop souvent, malheureusement, les effets du partage du patrimoine familial et du régime matrimonial ne sont pas pris en compte, tout comme l’affectation du paiement des dépenses sur un legs particulier.

Comme vous avez pu le constater par l’exemple donné, ces effets peuvent complètement anéantir la volonté du testateur.

Vous désirez venir discuter de votre testament avec nous ? Un notaire de notre étude se fera un plaisir de vous rencontrer et vous aidera à y voir plus clair sur le sujet !

 

 [1] Choinière (Succession de), 2006 QCCS 623.

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